U-ma-mi. Ces trois syllabes qui ont inspiré le titre de mon blog, vous les connaissez peut-être si vous êtes connaisseurs du Japon ou de la cuisine japonaise. Pour les autres, vous en avez peut-être entendu parler ici ou là, le mot étant à la mode depuis quelques temps, mais sans savoir exactement de quoi il s’agit. Voici quelques explications:
Umami est un mot japonais qui trouve son origine dans l’adjectif 旨い uma-i (délicieux), et 味 mi (le goût). Umami signifie donc le goût délicieux. Le mot a été forgé au début du 20ème siècle par un scientifique japonais, Kikunae Ikeda. En 1908, celui-ci remarque que le bouillon issu de l’algue kombu, ne correspond à aucun des goûts basiques connus. Il découvre que c’est un acide aminé appelé glutamate, qui est à l’origine de cette sapidité.
Ceux d’entre vous qui n’ont jamais mangé d’algue kombu se demandent peut-être quel goût peut avoir l’umami? Et bien figurez vous que vous avez déjà gouté cette saveur sans même le savoir! En effet, le glutamate à l’origine de l’umami est présent dans de très nombreux aliments. On le retrouve particulièrement dans les viandes, les fromages, mais aussi les tomates, les choux, les champignons….On en trouve même en grande quantité dans le lait maternel! D’ailleurs, cette saveur n’est pas inconnue en France, puisque le gastronome du 18ème siècle Brillat-Savarin l’avait déjà décrite dans son traité de la physiologie du goût et l’avait nommé ozmazône.
Depuis plusieurs années, le glutamate est décrié à cause notamment du syndrome dit « des restaurants chinois » (nausées ou malaises) qui serait une forme d’allergie ou d’intoxication au glutamate monosodique. Comme pour l’aspartame, l’autre chouchou de l’industrie agroalimentaire, il existe un vif débat autour de la supposée toxicité du glutamate monosodique. Ses détracteurs expliquent que sa consommation excessive entrainerait diabète, hypertension, obésité… A ce jour il n’existe pas de preuve de cette toxicité, bien que sa consommation pourrait diminuer l’effet de certains médicaments. Difficile d’y voir clair tant on trouve tout et son contraire sur la toile. Personnellement, le problème est réglé: je n’achète quasiment jamais de produits industriels et je n’aime pas ceux qui contiennent de longues listes d’additifs comme le glutamate monosodique. Cependant, à la maison, j’aime beaucoup travailler l’umami dans les plats, mais toujours avec des sources naturelles. J’aurais l’occasion d’y revenir dans d’autres articles.
En occident, et en France notamment, l’usage du mot umami est assez récent, et tout le monde ne s’accorde pas forcément sur la nécessité d’accorder à l’umami le titre de cinquième goût, à coté des quatre basiques que sont le sucré, le salé, l’amer, et l’acide.En effet pour certains scientifiques, comme Hervé This, le père de la gastronomie moléculaire, l’umami n’est pas la cinquième saveur, mais juste la saveur du glutamate de sodium. Le scientifique explique que le bouillon japonais diffère du bouillon de viande français par le type d’acide aminée à l’œuvre: dans le premier c’est l’ acide glutamique qui donne sa saveur au bouillon, alors que le deuxième est composé de trois autres acides aminés (glycine, proline, hydroxyproline). Cela signifie que l’on ne saurait réduire l’umami à la seule présence du glutamate et qu’il existe d’autres acides aminées que l’on peut qualifier d’umami. Par aillurs, plus on laisse un aliment mûrir (légumes), rassir (viandes), sécher (poissons) ou fermenter (shoyu, kimchi…), plus celui-ci présentera une saveur umami. Cela s’explique par le fait que l’umami provient davantage de la décomposition des protéines que des protéines en elles-même. De plus, la combinaison de deux aliments riche en umami permet d’en décupler la saveur. Par exemple, le parmesan est riche en glutamate, et les tomates mûres également. Leur association est donc à tous les coups une réussite gustative (si les produits de bases sont bons évidemment).
De la même façon au Japon, c’est la combinaison du glutamate avec d’autres aliments qui va multiplier son efficacité gustative. Dans de nombreux plats japonais, le le bouillon – appelé dashi (=glutamate) est associé à du sel, du sucre, du miso, du shoyu (sauce de soja)…C’est l »omniprésence de ces ingrédients dans de nombreux plats japonais qui permet selon moi de parler de l’umami comme un goût très spécifique de la cuisine japonaise.
Personnellement, j’ignore dans quelle case il faudrait ranger l’umami, et cela m’importe peu, l’essentiel étant pour moi de comprendre comment les japonais ont su utiliser certaines molécules pour donner à leur cuisine cette saveur reconnaissable entre mille.
En conclusion, on peut dire que l’umami est universel et existe dans toutes les cuisines du monde, parce qu’il marque la présence (ou plus exactement la dégradation) des protéines (=les acides aminés) essentielles à la vie humaine. Cependant, il ne me parait pas idiot de parler d’un umami typiquement japonais, tant il est identifiable dans cette cuisine par l’utilisation de quelques produits récurrents, que nous allons apprendre à utiliser et à cuisiner ensemble sur ce blog! A vos tabliers!
Sources:
http://www.lemonde.fr/voyage/article/2011/03/02/japon-umami-la-cinquieme-saveur_1486968_3546.html
L’umami n’est pas la cinquième saveur – Hervé THIS – magazine Wasabi N°41
http://etrangerecuisine.canalblog.com/archives/2012/03/07/23700145.html
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